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Népal
10 Nov. 2003 ~ 30 Nov. 2003 |
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POPULATION :
24 920 211 Hab
SUPERFICIE : 147 181 Km²
CAPITALE : Katmandou
LANGUE : Népali |
MONNAIE : Rupaiya
FUSEAU HORAIRE : GMT + 5H45
Point Culminant : 8 850 m (Everest)
STATUT : Monarchie parlementaire |
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11 novembre 2003 - Arrivée
à Katmandou |
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Ca y est ! Cette fois, nous y sommes. Le voyage jusqu'a Kathmandou a ete long, et nous n'allons pas trainer ce soir : nous venons d'enchainer 1H d'avion jusqu'a Londres, 2H d'attente, 9H de vol jusqu'a Delhi, 12H d'attente dans l'aeroport sur des sieges plus qu inconfortables (impossible de s'allonger, et nous n'avons pas dormi), puis 2H de vol jusqu'a Kathmandou. Nous sommes arrives a 15H heure locale (11H15 heure francaise), completement dephases.
Heureusement nous avions en tete l'adresse d'un hotel que Gregoire, le cousin d'Emilie, nous avait conseille.
Notre premiere nuit aura donc lieu face a Bouddha, face au plus grand Stupa du Monde (C est le Stupa que l'on voit dans le film "Little Buddha", autour duquel tournent en priant des centaines de fideles, dans le sens des aiguilles d'une montre)...
Autrefois les voyageurs nepalais et tibetains ne commencaient jamais leur periple a travers l'Himalaya sans tourner les moulins a prieres autour du Stupa et confier ainsi leur voyage a Bouddha.
Nous nous sommes donnes rendez-vous demain matin avec le soleil sur le Stupa pour feter notre Depart et confier notre voyage.
Pour ce jour, nous avons eu juste le temps d'apprecier l'accueil nepalais. Autour du Bouddha se degage une atmosphere sereine, nous sommes entoures de sourires. La douceur a l'air d'habiter ce peuple.
Vue de la rue : nous avons l'impression d'etre en terrain connu, le Nepal ressemble sous bien des aspects a l'Inde : Avenues principales avec ornieres, la meme folie au volant avec les toles qui se frolent sans cesse, les vehicules incongrus comme ce moteur nu, pose sur deux roues, tirant un chariot de legumes, la poussiere qui vole tout le long de la route, les enfants qui s'amusent, insouciants, des vaches sacrees qui deambulent nonchalamment sur les grandes arteres de la capitale, les petites boutiques dont la vitrine n'excede pas le metre 50 sur la rue et qui vendent de tout pour tout, et enfin, ces inombrables petits metiers de la rue, dont ce re-semelleur qui s'est improvise une devanture en collant deux grosses semelles sur un mur.
Vraiment, notre voyage s'annonce sous les meilleures auspices... |
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12 novembre 2003 : La nuit tous les chiens sont sortis |
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Finalement le soleil nous a devance d'une bonne demi journee. Eh oui, ses nuits ne sont apparemment pas de 16 heures au Nepal !
Lever a 13 H pour cette premiere journee au Nepal... soleil deja de l'autre cote du zenith. Il fallat bien recuperer les 2 nuits precedentes sans dormir, et puis nous avons pu apprecier durant toute la nuit les talents vocaux de nos amis les betes : un vrai remake de West Side Story, version canine. Imaginez des gangs de dizaines de chiens qui se dechirent et s'entretuent toute la nuit pour delimiter leurs territoires...
Grognements rauques d'intimidation, aboiements feroces et rales suraigus des victimes, prises entre deux crocs. La nuit, Katmandou appartient aux chiens, qui se prelassent imperturbables au soleil durant la journee, evitant tant bien que mal le tourbillon humain galopant dans les rues. La nuit tombe vite, (vers 17H30), le magma humain s'engoufre dans les petits immeubles de briques et de broques a grands pas. Bientot ne restent plus que les meutes de chiens avides, a la recherche de quelques restes bien improbables. |
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13 novembre 2003 : Organisation du sejour |
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Nous rentrons ce soir bien erreintes, apres avoir visite une partie de Kathmandou : le quartier touristique de Thamel et le Durbar Square qui compte quelques temples a l'architecture himalayenne tres originale (photos dans quelques jours des que nous parvenons a les telecharger).
Nous partons des demain pour un trek de 13 jours dans l'Himalaya, avec un guide anglophone et un porteur. L'itineraire que nous avons choisi passe par des villages peu visites ou nous irons a la rencontre d'ethnies qui vivent dans les montagnes, loin des cites, et encore en quasi-autarcie. Nous demarrons a 1.600 m d'altitude dans la vallee d'Hellambu pour terminer a plus de 5.000 m dans les glaciers de Langtang. Le trek est apparemment assez/plutot/tres physique, car c'est une succession de montees et de descentes qui cassent le rythme... on verra des demain.
Pour partir par cette saison (seche et froide) et a cette altitude (a 4.300 m, la ou nous dormirons au plus haut - en lodges/refuges, il fera -15 degres celsius dehors la nuit) nous avons du completer notre panoplie de bon-montagnards : location de duvets (deja utilises une bonne cinquantaine de fois vu la couche de crasse, jamais laves evidemment), achat de bonnets, gants, polaires supplementaires. Et la, O surprise, nous nous rendons compte que les meilleures marques de materiel d'alpinisme sont toutes representees (Eider, The North Face...) ET QUE TOUS LES PRODUITS SONT VENDUS EMTRE 5 A 10 FOIS MOINS CHER QU'EN FRANCE !!! O Rage, O Desespoir, nous qui avions passe un temps infini a trouver le meilleur materiel au meilleur prix... Au moins, que ceux qui sont interesses par le trekking le sachent, venez tout nus au Nepal, vous serez habilles de la tete aux pieds pour 5 a 10 fois moins cher qu'en France (meme en comptant les achats en magasins d'usines et les soldes). Exemple : Veste The North Face double membrane Goretex, doublee d'une couche polaire 300 mg, tres legere et etudiee pour les deplacements d'alpinistes en haute montagne : 2.500 Rupees = 250 FRF = 38 EUR !!! Pour un prix en France d'environ 350 EUR (Vieux Campeur). Explication : nous venons en fait d'apprendre que la marque "The North Face" compte quelques ateliers de fabrication a Kathmandou...
Apres cette premiere mise en jambes, nous avons programme pour la suite un sejour dans le Chitwan National Park, ou nous parcourerons la jungle a dos d'elephants, a la recherche du mysterieux Tigre du Bengale et du Rinhoceros unicorne... Nous n'irons pas nous y promener en velo car il parait que le Rinhoceros ne supporte absolument pas les velocyclistes... Chacun ses lubies.
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Mercredi 26 Novembre : Hellambu - Langtang trek |
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Des premiers jours marques par un climat politique instable |
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Le Nepal souffre aujourd’hui d’un climat politique particulierement instable. Le roi Gyanendra, frère du précédent Roi, tente de s’arroger les pleins pouvoirs. Les maoïstes, opposition extrémiste au Roi, appellent au soulèvement du peuple et combattent les forces militaires royales dans la region du Terai.
L’actuel Roi Gyanendra est tres impopulaire car il aurait, dit-on, assassine en 2001 son frere Birendra et toute sa famille pour s’approprier le pouvoir.
Depuis la dissolution du parlement en 2002 par le Roi, les nepalais reclament des elections pour maintenir la democratie dans le pays. Bien qu'annoncant des elections prochaines, le Roi nomme ses representants a toutes les fonctions cles du gouvernement et de l'administration, aussi bien dans les villages qu'a Kathmandou. Face a cette evidente prise de controle du pouvoir absolu, les maoïstes intensifient leurs actions et exhorte le peuple a la revolution. Les autres partis d'opposition sont extremement divises et aucun leader n'est suffisamment charismatique pour federer un mouvement contre le Roi. Le pays compte parmi les plus pauvres du Monde et, devant le gachis de l'Etat, la corruption a tous les niveaux, une partie de la population degoutee se rallie au mouvement maoïste.
Aussi les greves sont frequentes dans ce contexte et nous apprenons, la veille de notre depart, que les bus sont en greve et que nous allons devoir entreprendre notre trek dans l'autre sens, ce qui le rend encore plus difficile. Eh oui, dans ce sens, les ascensions sont beaucoup plus importantes !
8H du matin : Krishna, notre guide (c'est apparemment courant de porter le nom d'un Dieu), et Hem, notre porteur, nous attendent a l'entree principale de Bodhnath (Buddha). Krishna est un petit homme tout sourire qui ne depasse pas le metre 50 mais qui a l'air d'avoir une envie folle de nous emmenner sur le toit du Monde. Hem, quant a lui, est bien plus grand et a voir sa morphologie, la montagne doit etre son terrain de predilection : sec, muscle, le pas sur. Il enfile le sac a dos de 15 Kgs que nous lui qvons prepare comme un T-Shirt.
Et nous voila, la petite equipe, compresses a bord d'une mini TATA taxi, partis en direction de notre village de depart.
Nous passons la notre premier poste de controle militaire.
Nous commencons donc au nord est de Kathmandou, dans la petite ville de Sundarijal ou se cotoient BRAHMAN et NEWAR.
Quelle premiere journee ! Des marches en pierre a n'en plus finir, entre 5 et 50 cm de hauteur, de toutes les formes et de toutes les declinaisons possibles, histoire de bien casser le rythme. Notre ascension nous entraine loin des routes, de l'electricite, du telephone... nous voila partis pour 12 jours coupes du reste du Monde, et certains villages seront a plus de 4 jours de marche de la route la plus proche.
La montee est longue, lente, difficile pour nos muscles qui n'ont pas ete suffisamment entraines. Le chemin traverse de petites rivieres, des villages ou les enfants jouent avec les poules et les chevres. Emilie s'arrete a chaque animal rencontre pour lui raconter comment la montee est difficile pour venir le voir. Les enfants, eux, n'ont pas l'air de souffrir de monter et de descendre en courant ces ioncroyables marches. Leur ecole se situe dans le village que nous avons laisse en contrebas, quelques bonnes centaines de metres plus bas, et ils empruntent ce chemin plusieurs fois par jour.
La haut, plus de bruit, plus de circulation trepidante, de klaxon a tue-tete comme a Kathmandou, plus d'aboiements incessants pendant la nuit, plus de pollution, plus de poussiere. Malgre la difficile remise en route de nos muscles, nous apprecions interieurement ce nouvel environnement.
A l'entree de la reserve naturelle de Shivapuri, nous passons notre deuxieme poste de controle militaire.
Plus loin, nous apercevons les premieres cultures en terrasses ou les champs sont vert tendre. Nous croisons beaucoup de gens des villages environnants qui portent sur leur dos de lourds fardeaux, accroches par un solide bandeau sur leur tete. Un homme nous depasse pieds nus. Il doit bien porter dans les 50 Kgs de materiels heteroclites dans un panier d'osier. Krishna nous apprend qu'il fait l'aller retour tous les jours a pieds entre son village et Sundarijal pour vendre sur le marche de son village divers ustensiles et consommables.
La montee s'acheve enfin, nous sommes en haut d'une petite colline de 2.300 m de haut d'ou nous apercevons notre premier village etape : Chisopani (les nepalais appellent montagnes les sommets qui ont de la neige, soit au-dessus de 6.000 m d'altitude).
Juste apres notre arrivee dans le village, alors que nous prenons connaissance des lieux et de notre chambre, nous apercevons un groupe d'une vingtaine d'hommes, mitraillettes au poing, certains avec le foulard sur le nez, qui entrent a leur tour dans le village. Par petits groupes, ils entrent dans les maisons du village (qui en compte 6 au maximum). 2 hommes passent devant nous dans le lodge mais ne nous pretent aucune attention. Les villageois, intrigues, sortent sur le pas de leur porte. Notre guide, Krishna, essaye d'attraper au vol une discussion mais les hommes ne parlent pas entre eux. Tous sont jeunes et doivent avoir entre 18 et 22 ans, 2 sont plus ages et semblent etre leurs chefs. Mais nous n'en saurons pas plus car deja le groupe s'eloigne vers la montagne. Plus tard nous apprendrons par deux femmes suisses qui ont egalement croise ce groupe qu'ils transportaient avec eux un corps.
Groupe revolutionnaire arme maoiste, section de l'armee en civile qui traquait des maoistes... nous ne saurons finalement pas qui etaient ces hommes. Compte tenu de leur age (entre 18 et 22 ans) et de leurs armes, Krishna penche davantage pour l'hypothese de l'armee en civile.En effet, les jeunes qui veulent effectuer leur service militaire ont entre 18 et 22 ans et les Maoïstes ne peuvent apparemment pas équiper tous leurs homes de telles armes. Ce sujet sera assez récurrent durant nos discussions avec Krishna et nous l’aborderons de nouveau quelques jours après.
Le soir même, cet évènement est déjà oublie et pour fêter l’événement, Olivier allume un bon Cigare Romeo & Julietta qu’il partage avec les Népalais présents.
C’est la première fois qu’ils voient et goûtent un Cigare et l’effet est de taille. Certains retiennent la fumée le plus longtemps possible dans la bouche jusqu'à en avoir les larmes aux yeux, d’autres inspirent profondément, avalent la fumée et manquent s’étouffer en crachant leurs poumons… tout cela dans une atmosphère joyeuse ou tout le monde rigole de voir la tête grimaçante de l’autre.
Notre première nuit fut plutôt fraîche, et ce n’était que la première.
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Acclimatation |
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Les deux journées suivantes sont une succession de montées et descentes durant lesquelles nos muscles travaillent bon train. Les paysages se succedent, de vallée en vallée, de village en village. Nous croisons quelques trekkers, certains vont dans le même sens que nous ; grève des transports oblige, nous sommes quelques-uns uns a parcourir le trek Hellambu-Langtang dans ce sens.
Aux étapes dans les refuges, nous rencontrons beaucoup de trekkers de toutes les nationalités : Américain éternel voyageur, Polonais habitant l’Afrique du sud, Australiens rendus au tiers de leur tout du monde, Japonais ne parlant ni l’anglais ni le népalais et voyageant seul, Français, Belges, Allemands, Danois, Suisses… autant de rencontres autour du voyage qui ont enrichi notre parcours.
A la fin du 3eme jour, nous arrivons à Tharepati, petit village de 4 ou 5 lodges (refuges0, perche à flanc de montagne a 3600m d’altitude. Le froid devient mordant des que le soleil disparaît. Krishna nous emmène dans le lodge ayant la plus belle vue sur les montagnes, de chaque cotes du lodge. Le problème, c’est que c’est également le lodge le plus expose aux vents, puisqu’il est situe sur l’arête de la montagne… Nous le comprenons plus tard, une fois installes.
Les lodges a cette altitude se ressemblent tous : les murs sont des planches de pins qui travaillent avec les vents et qui laissent passer un vent glacial et pénétrant entre les interstices de plus d’1 cm de large. Les cloisons sont si fines qu’on a souvent l’impression de dormir avec le voisin, de partager ses insomnies à cause de l’altitude ou du froid, de se lever quand il se lève, de ronfler alors que l’on ne ronfle pas !…
Au passage, la règle d’or avant de se coucher est de ne pas trop boire le soir et d’aller aux toilettes juste avant de se rentrer dans\s son duvet. En effet, rien que d’avoir à se lever en pleine nuit, ne serait-ce qu’une fois, quand il fait –10 degrés dehors, est un véritable calvaire. Nous passons un temps infini, méticuleusement, à enfiler chaussettes de nuit, pantalon de nuit, T-Shirt manches longues, bonnet, gants et écharpes, à passer le sac a viande (drap intérieur) dans le duvet, à ajuster les couvertures supplémentaires sur le duvet, à étendre la veste Gore-tex et les deux polaires sur les couvertures et surtout, surtout, à réchauffer pendant une demi-heure l’intérieur du duvet… et en sortir nous donne l’impression de plonger tout nu dans la mer arctique.
La salle commune des lodges est carrée et se compose généralement de bancs sur le cote, de tables en longueurs, avec un poêle au milieu autour duquel sont disposes quelqu’un chaises. Et là, il vaut mieux arriver dans les premiers dans la salle commune ou alors d’être très bien couvert, car avec les quelques chaises autour du poêle, on joue très vite a « Qui va aux toilettes ou a son sac, perd sa place », jeu plus ou moins drôle suivant la place que vous trouvez.
Le 4eme jour, nous croyons avoir trouve une solution imparable pour éviter tout adversaire à ce jeu : marcher plus vite et plus loin que tous les autres, comme ça nous aurons le poêle pour nous tous seuls… Solution O combien hasardeuse et dangereuse, mais ça, nous l’apprendrons a nos dépends un peu plus tard.
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Passage du col de Laurebina - 4.610 m Alt.
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Pour ce 4eme jour nous avons donc un objectif ambitieux : traverser Gopte (2h30 de marche), Phaidi (2h de marche), franchir le col de Laurebina a 4610m d’altitude (3h30 supplémentaires) et redescendre de l’autre cote a Gosaikunda a 4300 m d’altitude pour y dormir (1h de plus).
Pour mener à bien notre projet, nous nous levons à avant l’aube a 6h00. Le lever de soleil est magnifique, nous distinguons les sommets enneiges de la région de l’Everest et ceux de la région de Langtang ou nous nous dirigeons. Nous profitons de cet instant magique quelques minutes avant d’avaler nos « Tibetan Breads with Honey » accompagnes de « Lemon Tea ».
Malgré notre rapidité matinale légendaire, nous ne parvenons pas à lever le camp avant 7h45. Le sac prend encore trop de temps a faire. Apres plusieurs exercices répètes, nous arrivons enfin à boucler notre sac (1 sac pour 2, donc chaque élément rentre au millimètre près) en moins de 30 mn. Nous n’arriverons jamais à battre ce record.
Nous commençons par descendre à flanc de montagne dans un univers pétrifie par la glace. . Le moindre petit ru est gelé et l’herbe craque sous nos pas. Avec l’altitude, la végétation est beaucoup moins abondante et nous sommes passes en 3 ours de cultures en terrasses a l’aridité de la haute montagne en passant par la jungle. Le rythme est bon, trop peut-être.
Une succession de montées et descentes nous entraîne un peu fourbus à Phaidi (3400m) ou nous nous arrêtons pour déjeuner.
Nous poursuivons notre route après un repas bien mérité (mais végétarien comme toujours) et nous entreprenons une ascension de 1200m de dénivelé. Les premiers mètres se passent sans soucis, au même rythme que les premières heures. Puis, brusquement vers 4000m d’altitude, j’ai l’impression de ne plus avoir assez d’oxygène pour alimenter mes muscles. Mes pieds deviennent lourds, difficile à bouger, mon cœur bat la chamade. Je m’arrête sur un rocher. Voilà les premiers effets de l’altitude.
Emilie ne ressent pas ce problème. La montée est abrupte, difficile, mais elle ne souffre apparemment pas de ce manque d’oxygène. Nous reprenons sur un tout autre rythme :des pas de 5 à 10 cm au plus, extrêmement lent. Ca va un peu mieux pour moi, mais l’effort à fournir est considérable. Nous faisons maintenant des pauses toutes les 10mn. Pour Krishna et Hem, l’ascension n’a l’air de pauser aucune difficulté, bien qu’ils disent le contraire. Krishna nous alimente en énergie a chaque pause, avec quelques fruits secs et sucres. Nous buvons beaucoup d’eau.
Le ciel devient de plus en plus menaçant. Nous sommes a 4.500 m d’altitude et il fait vraiment froid. Emilie peine également mais ne ressent pas ce manque d’oxygène. La neige commence a tomber, fine et dure, nous fouettant le visage. On dirait que les elements se sont donne le mot pour nous donner du fil a retordre. Le vent se leve, violent, un vent a decorner les yaks.
Finalement, apres bien des efforts, nous parvenons au col de Laurebina – 4.610 m d’altitude. C’est la premiere fois que nous montons aussi haut a pieds. Le vent est encore plus violent et la temperature doit avoisiner les – 15 degres. Nous franchissons la passe. Les lacs sur cet autre versant sont geles. Des bourrasques de neige glissent a la surface de la glace. Transis, nous n’osons pas enlever nos gants pour prendre une photo. D'ailleurs, nos doigts sont completement engourdis et nous n'arriverions meme pas a oter l'etui de l'appareil photo.
La descente, en revanche, ne pose aucune difficulte et nous avons l'impression cette fois de marcher dans du coton.
Nous arrivons enfin a Gosaikunda - 4.300 m d'altitude - dans un lodge ou nous attendent un poele, un americain, un allemand et quatre bonnes places au chaud autour du poele... Les habitants du lodge nous accueillent chaudement avec de larges sourires.
Cette fois, Emilie ressent le mal de l'altitude. Impossible d'avaler quoi que ce soit. Le medicament part dans les toilettes. Soulagee, elle gagne le lit mais ne parvient pas a dormir. Pour ma part, je me sens beaucoup mieux que dans la montee. Je passe ainsi la soiree - de 17H30 a 19H30 - a discuter avec nos deux compagnons d'etape et les habitants du lodge. Ils nous informent au passage qu'habituellement, voire systematiquement, il faut 2 jours pour rejoindre Gosaikunda depuis Tharepati. Nous leur confirmons que c'est en effet beaucoup plus prudent et que si c'etait a refaire, nous prendrions certainement 2 jours.
La soiree s'acheve sur une "Apple pie" facon tibetaine.
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Une descente douloureuse
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Le 5e jour, apres une nuit on ne peut plus glaciale, nous devons rallier Thulo Syabru, village TAMANG (ethnie d'origine tibetaine), situe en contrebas a une altitude de 2.200 m, soit encaisser dans les genoux un denivele de 2.100 m en 6H de marche. Cette descente est extremement penible et Emilie ressent de violentes douleurs aux genoux.
Face a nous, les sommets tibetains, saupoudres de neige, nous invitent a continuer. Apres 6H de marche, un singe et un yak plus tard, nous arrivons a Thulo Syabru ereintes.
La nuit meme, une diarrhee suraigue me cloue sur place et nous sommes obliges de rester dans le village TAMANG le lendemain : une bonne occasion pour Emilie de decouvrir un peu les coutumes et traditions de cette ethnie, tandis que je reste au lit ou ailleurs.
Le surlendemain et quelques comprimes apres, nous repartons en direction de Kyanji Gompa, petit village perche au fond de la vallee de Langtang. Et c'est la que nous comprenons notre malheur : nos genoux ne tiennent pas la route et nous font atrocement souffrir. Insuffisamment entraines, nous leur avons fait subir trop d'efforts. Et c'est en claudiquant que nous arrivons au bout de 3 jours de marche a Kyanji Gompa - 3.900 m d'altitude. Et la, il n'est plus question de poursuivre vers le glacier pour admirer la vue. La journee perdue nous contraint egalement a reporter pour plus tard le passage des 5.000 m.
Ici comme dans tous les villages traverses, la radio est le seul lien qui relie le village au reste du pays en temps reel. Le journal radio est un moment important de la journee et guides et porteurs se regroupent autour du poste. Aujourd'hui comme hier et les jours precedents, le bulletin fait etat d'affrontements dans le Terai entre maoistes et forces gouvernementales et parle de plusieurs victimes. Dans ce cadre exceptionnel, loin des villes, les montagnards suivent avec grand interet ces conflits humains et politiques.
Pourtant, les preoccupations quotidiennes reprennent tres vite le dessus : le fanage du ble, les labours avec buffles et charrues, le tressage des paniers en osier, la preparation du bambou pour le tressage de nattes, la garde des Yaks dans les montagnes, le tissage de vetements sur des metiers a tisser qu'on ne voit plus que dans les musees en France...
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Un retour couleur locale sur eboulis
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Sur la route du retour, nous apercevons des singes qui vivent a plus de 3.000 m d'altitude : visages noirs, poil gris argente, des "musk deer" selon Krishna (sorte de cerfs des montagnes avec de petits bois), perches dans les eboulis sur une pente a 70 degres, des aigles immenses qui planent lentement dans le ciel.
Apres 2 jours de marche supplementaires, nous arrivons a une route et attrapons un bus TATA dans la ville de Syabru Besi. En guise de route, il s'agit davantage d'un chemin vicinal de haute montagne, sans bitume evidemment, ou l'on aurait du mal a manoeuvrer avec une charrue. Et pourtant nous croiserons par miracle sur cette route d'autres vehicules.
Nous parcourons ainsi 148 Kms en 10H de bus et 1H de marche pour rallier Kathmandou !!! Le debut de la piste est impressionant avec le precipice quasiment sous les roues et le mantra bouddhique "Om Mane Pedme Hum" (Dieu cree toute vie) chante en boucle dans les hauts-parleurs du bus.
Apres 3H de bus, nous devons nous arreter et continuer a pieds pendant 1H : un gigantesque glissement de terrain a coupe tout moyen de communication - impressionant - Sur plus de 5 Kms, la route est completement detruite, emportee a plus de 1.000 m en contrebas. C'est arrive lors de la mousson, il y a 3 mois. Reconstruire la route prendra enormement de temps et en attendant seuls les hommes peuvent passer, avec leurs chargements sur le dos.
Le voyage vaut le detour pour la vie en bus. Il y a deux fois plus de personnes dans le bus que de places assises, et une bonne dizaine de personnes voyagent sur le toit. Beaucoup montent et descendent a des arrets imaginaires, en signalant par un cri au chauffeur qu'il faut s'arreter. Chaque passager emmene avec lui sa cargaison : des sacs entiers de choses les plus diverses. Pour certains, ce sont des savons mais qui sont en fait du lait solidifie aussi dur que de l'os mais qui se mange quand meme (moi non plus je n'ai rien compris a l'explication). A un arret, une chevre monte, accompagnee de son proprietaire. Elle devait faire le trajet pour la premiere fois car elle ne semblait pas rassuree. A un autre, ce sont 400 Kgs de radis nepalais, bien tasses dans des sacs sur lesquels tout le monde aura marche, comme ils avaient paye pour une place dans l'allee centrale.
Nous avons egalement ete controles 6 ou 7 fois par les militaires. A chaque fois, tous les hommes descendent du bus (sauf les touristes) pour une verification d'identite. Les sacs et le bus sont inspectes. Puis le bus fait 300 m et recupere les hommes. A au moins 2 check points, Olivier a ete pris pour un nepalais ! (Comme d'hab' finalement). En fait, les 7 premieres heures de bus sont sympathiques, mais les 4 dernieres sont vraiment longues ! Nous avons egalement pris notre premier Dal-Bhat (litteralement lentilles-riz), plat compose de riz, d'une soupe de lentilles et d'un curry de legumes - Tres bon. L'avantage de ce plat, c'est qu'il est complet et servi a volonte... avec parfois un agrement de pickles, d'un oeuf ou de quelques morceaux de mouton. En revanche, le mouton est servi nerfs, peau et os compris, car les nepalais mangent tout ! (les os compris... si si, nous pouvons temoigner !) Il ne reste rien dans le plat. Pour nous, petits europeens bien fragiles, c'est une autre paire de manches...
Pour clore ce trek, nous invitons Krishna et Hem au restaurant... italien ! Et nous terminons cette derniere journee en degustant des spaghettis a la carbonara comme s'il s'agissait de foie gras.
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Samedi 6 Decembre : Un Python, un bebe Rhino et deux marabouts |
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Nous quittons Bodhnath sous un lever de soleil magnifique pour attraper un TATA bus, classe touriste. La route pour le Chitwan National Park a disparu a force de glissements de terrains successifs lors de la derniere Mousson. Aujourd'hui, c'est sur une piste de fortune, amenagee sur les eboulis a grands renforts de pierres et de remblais varies, que circulent a la file indienne des centaines de camions, bus et autres vehicules. Nous croisons nombre de vehicules accidentes sur le bord de la route.
En milieu de journee, nous arrivons a notre Resort, petit paradis en bordure du Parc National. La saison touristique est sensee battre son plein, le climat etant tres agreable, mais les hotels sont quasiment vides, a cause des afrontements entre maoistes et gouvernement un peu plus a l'ouest. Neanmoins les maoistes ne s'en prennent jamais aux touristes, sauf parfois a leur porte-monnaie en reclamant une "Taxe revolutionnaire". Aussi nous ne sommes que 4 dans l'hotel, accueillis dans les plus beaux bungalows, au milieu d'un jardin tropical plein de bananiers et de fleurs exotiques.
Nous enchainons sur ces quelques jours une descente en pirogue sur la riviere Rapti, une marche de quelques heures dans la jungle, un safari a dos d'elephants, et pour completer, un Jeep Safari au milieu des lacs.
Malgre ces diverses tentatives d'approches, nous ne verrons finalement pas le timide Tigre Royal du Bengale. Nous ne sommes que relativement decus dans la mesure ou nous savions a l'avance qu peu ont la chance de l'apercevoir. La derniere fois que notre guide en a vu un, c'etait il y a 3 ans. Le parc couvre 932 Km carres et la faune compte 43 especes de mammiferes et plus de 450 especes d'oiseaux differentes. La population de tigres est estimee a environ 106 individus a ce jour. Sachant qu'ils sont extremement timides, qu'ils chassent quasi-exclusivement la nuit et qu'ils dorment le jour, nous avions abandonne l'espoir d'en apercevoir un.
En revanche, nous avons surpris un enorme Python, lezardant en bordure de riviere. Alors que nous nous appretons a traverser la riviere en pirogue pour rejoindre le village, nous croisons en sens inverse une troupe de soldats. Apres quelques phrases echangees avec ce groupe, notre guide, Lox, nous apprend qu'un Python a ete repere a quelques centaines de metres de la. Les soldats nous proposent de les accompagner, et nous voila partis sous bonne escorte. L'animal est imposant : 7 m de long, 25 cm de large et une tete aussi large qu'une enorme main. Il se tient la tete en l'air, sifflant tant qu'il peut. La premiere partie de son corps est contractee en form de S, prete a s'elancer. Le Python n'est pas venimeux mais n'en reste pas moins tres dangereux. Sa force est concentree dans ses anneaux et il est capable de broyer les os de n'importe quelle proie a partir du moment uo il s'enroule autour d'elle. Aussi les soldats restent a bonne distance. Lox attrape un baton et commence a taquiner l'animal. Le python devient de plus en plus nerveux. Emilie, avec le guide, se tient a 1,5 m de la tete du serpent. Beaucoup trop pres. Elle ne semble absolument pas effrayee. Pourtant, le python pourrait facilement l'atteindre en detendant son corps. Mais elle refuse de remonter, pretextant que la vue est meilleure de cet endroit. Je suis les pieds dans la riviere, le serpent a la tete tournee de l'autre cote. A tout hasard, je demande a notre guide si le python sait nager. Il me repond que oui... Je m'eloigne un peu, pour voir si l'eau est plus chaude au milieu.
Apres une bonne trentaine de photos (le serpent, la tete du serpent, la langue du serpent, les soldats autour du serpent, nous avec le serpent, le serpent et nous...) nous decidons de lever l'ancre et de traverser la riviere a pieds. Ca tombe bien, je commencais a avoir les doigts de pieds palmes. Nous helons une pirogue a l'endroit le plus profond. Pendant ce temps, un aigle nous observe a la derobee.
La pythonnerie nous a mise en retard sur l'horaire et c'est en courant qu'on attrape notre elephant. Juste a temps ! Du haut de ses 2,75 m, nous avons un point de vue panoramique extraordinaire sur la vie sauvage. Nous passons ainsi quelques heures emerveilles, a contempler la momification des crocodiles (ils ne bougent absolument pas pendant des heures la gueule beante !), a surprendre une mangouste partie faire son marche dans quelque nid de serpent, a effrayer un troupeau de daims magnifiaues, a assister au repas d'un Rhinoceros unicorne male.
Le lendemain, nous jouons avec des elephanteaux dans le centre d'elevage. A a peine 1 mois, le petit doit deja peser dans les 100 Kgs et il s'avere le plus fort quand il joue a nous pousser de 2 m en arriere. L'apres-midi, nous observons les oiseaux en bordure de riviere, dont 2 enormes marabouts perches sur une branche, qui observent egalement nos etranges allees et venues. Sur le chemin du retour, nous croisons par hasard un bebe Rhinoceros : Beauty. La petite a 1 an et a ete recueillie alors qu'elle n'avait qu'une dizaine de jours par des militaires en patrouille dans le parc. Ses parents venaient de se faire tuer par des braconniers pour leur corne. Depuis, un ange gardien veille sur elle et la nourrit, en attendant de pouvoir la relacher dans le parc a ses 3 ans. Nous la rencontrons alors qu'elle est en train de rentrer se coucher dans l'enceinte de la base militaire.
Nous terminons notre sejour dans le Parc par un safari en 4x4 au milieu des lacs. La faune est extremement riche et nous ne retiendrons pas le quart des noms d'oiseaux que nous cite Lox. Un Cerf aboyant boit dans la riviere. Un Rhinoceros dort, completement affale au milieu d'un champ. Un aigle a tete chauve (c'est la traduction du nom anglais que nous avons comprise, mais vous pouvez la mettre en doute car il avait quand meme pas mal de plumes sur le caillou) nous suit sur quelques kilometres. Des phacocheres farfouillent dans un champ en quete de nourriture. D'enormes sangliers les imitent un peu plus loin. Des crocodiles se tiennent a l'affut sur les rives des lacs alors que des egrettes inconscientes trainassent sous leurs crocs. Nous nous arretons un moment pour admirer le magnifique travail des termites : des cites surgies de terre nous dominent avec plus de 2,5 m de haut. plus loin, un martin-pecheur guete sa proie dans la riviere. Trop timide, nous n'aurons finalement pas la chance d'avoir une photo de ce rare specimen : assez gros, le bec legerement arque sur le dessous et les plumes du dos bleu turquoise.
Pour clore notre visite du Nepal, des cerfs nous saluent avant de regagner le sous-bois.
Demain nous gagnerons la frontiere pour passer en Inde...
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